Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/228

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— Tu ne demeures pas rue Sauval, demandat-il ?

— Non, c’est Eugénie qui demeure là.

— Madame Laveau ?

— Elle fit signe que oui ; – et ils se turent longuement.

Honteux de reproposer l’offre qu’il avait d’abord rejetée, André se mordait les lèvres. Il faut pourtant que je me décide, se dit-il ; alors il mit tout amour-propre de côté et il déclara qu’en somme, en prenant certaines précautions, il pourrait l’accueillir chez lui, que si elle voulait, il irait la chercher, après demain, samedi, à son atelier, qu’il aviserait d’ici là au moyen de l’introduire, sans scandale et sans bruit, dans son logement.

Le visage de Jeanne s’éclaira ; tu verras comme je mangerai vite, samedi, pour avoir fini plus vite, fit-elle, en riant.

Ils avaient atteint la rue Bonaparte où elle habitait. – Jeanne pensa qu’André allait l’embrasser et elle s’essuya furtivement la bouche, mouillée par la buée de l’haleine condensée sous le voile ; lui, sous le prétexte de se moucher, s’essuya dans la même intention, les moustaches. Et, alors, ils s’embrassèrent, mais mal. Devenu timide soudain, André ne la baisa que sur les joues et sur le front. – Des baisers de nounou et de père, dit-il, pour s’excuser, mais elle offrit bravement ses lèvres qu’il plaqua, aussitôt sur les siennes, murmurant : alors, c’est entendu, je t’attendrai devant la porte ; – samedi, à huit heures, n’est-ce pas ?