Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/50

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Il en etait là de ses réflexions, lorsqu’ils atteignirent la rue des Quatre-Vents. La boutique qu’ils cherchaient était située dans une encoignure, badigeonnée de noir du haut en bas, ornée de filets et de lettres jaune-serin. C’était une blanchisserie éclopée modèle, une cabine fumeuse, pavoisée de trois bonnets à choux, pendus dans une montre. Près d’une porte sur les vitres de laquelle des doigts avaient dessiné des 8 dans la poussière, un vieillard paralytique et gâteux était assis sur un fauteuil percé d’un trou et humait l’air. Quand il vit les jeunes gens s’avancer vers lui, il baissa la tête et, avant même qu’ils eussent parlé, il saliva copieusement sur son linge et murmura, à voix basse, d’un ton où il y avait du désespoir et de la confidence : Je ne sais pas moi… je ne sais pas…

Ce vieillard était lugubre et puait.

André et Cyprien entrèrent. Dans la boutique, au fond, une fillette, la mine abrutie, s’amusait à faire griller sur la bouche du poêle, un de ses cheveux lorsqu’il se recroquevillait, elle l’approchait de son nez et semblait se complaire à en flairer l’odeur.

André lui exposa le motif de sa visite. Elle ricana et parut encore plus hébétée. Heureusement que la patronne survint.

— Faudra, dit-elle, si vous tenez à parler à Mélanie, que vous alliez jusqu’au n° 46 de la rue Duvivier au Gros-Caillou, c’est là qu’elle habite, mais si vous voulez l’attendre, elle sera ici dans une heure au plus ; elle fait un ménage, dans le quartier et