Page:Huysmans - En rade.djvu/118

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Dans l’autre pièce, il disposerait ses livres sur de simples rayons de bois peint en noir, organisant de la sorte une salle à manger-bibliothèque.

Il sourit, désireux, presque impatient de réaliser ce logis intime ; il lui sembla qu’il serait mieux calfeutré, plus chez soi, mieux à l’aise, dans ces chambres de banlieue, que dans son appartement de Paris, aux vastes pièces.

Eh non, cela n’était pas possible ! Il roula du haut en bas de son rêve. Je n’ai même pas cette ressource des gens déchus de me retirer dans un coin, de me confiner dans un trou, de vivre une existence ouvrière, car pour réaliser ce modique rêve, il faut une femme économe et robuste ! et Louise n’est, depuis sa maladie, bonne à rien. Que faire d’une femme impotente, assise dans un angle, et frappant le plancher du pied ? et puis… et puis… qui sait si sa santé ne s’aggravera point et si je ne deviendrai pas, sans argent pour la soigner, garde-malade ?

Ah ! s’il était seul, comme sa vie s’arrangerait mieux ! Si c’était à refaire, comme il ne se marierait plus ! — À supposer, en effet, que Louise mourût, une fois le chagrin tari, il pourrait attendre sans trop pâtir les événements à naître ; il pourrait vivoter jusqu’à ce qu’il eût trouvé une place ; il pourrait peut-être découvrir une femme, râblée,