Page:Huysmans - En rade.djvu/167

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chée dans les entrailles même du sol en pleine nuit, était autrement douloureuse, autrement grande.

Et il renvoya un peu du mépris qu’ils lui portaient, à ces paysans pleurards dont la clémente vie eût été un incomparable Éden pour les mineurs, pour les mécaniciens, pour tous les ouvriers des villes ! sans compter que, l’hiver, les paysans baguenaudent et se chauffent, alors que les artisans des cités gèlent et triment. Oui, va, geins, se dit-il, s’adressant mentalement à l’oncle Antoine qui se lamentait, les deux mains sur le ventre, soupirant : — C’est-il donc point malheureux que du blé mou comme ça !

— Ah çà, quoi donc que t’as, toi, fit-il, après un silence, en regardant Jacques. Qu’est-ce qui te prend ?

— Je suis dévoré et partout à la fois, s’écria le jeune homme. C’était soudain une invasion de gale, une démangeaison atroce que les écorchures des ongles n’arrêtaient pas. Il se sentait le corps enveloppé d’une petite flamme et, peu à peu, à la passagère jouissance de la peau grattée jusqu’au sang, succédaient une brûlure plus aiguë, un énervement à crier, une douleur chatouillante à rendre fou !

— C’est les aoûtats, fit, en riant, la tante Norine, ils sont venus, tant qu’hier. Tiens, regarde