Page:Huysmans - En rade.djvu/195

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ptomaïne, qui se présente à l’état d’huile incolore et répand une lente mais tenace odeur d’aubépine, de musc, de seringa, de fleur d’oranger ou de rose.

Ce sont les seules senteurs qu’on ait pu trouver jusqu’ici dans ces jus d’une économie en pourriture, mais d’autres viendront sans doute ; en attendant, pour satisfaire aux postulations d’un siècle pratique qui enterre, à Ivry, les gens sans le sou à la machine et qui utilise tout, les eaux résiduaires, les fonds de tinettes, les boyaux des charognes et les vieux os, l’on pourrait convertir les cimetières en usines qui apprêteraient sur commande, pour les familles riches, des extraits concentrés d’aïeuls, des essences d’enfants, des bouquets de pères.

Ce serait ce qu’on appelle, dans le commerce, l’article fin ; mais pour les besoins des classes laborieuses qu’il ne saurait être question de négliger, l’on adjoindrait à ces officines de luxe, de puissants laboratoires dans lesquels on préparerait la fabrication des parfums en gros ; il serait, en effet, possible de les distiller avec les restes de la fosse commune que personne ne réclame ; ce serait l’art de la parfumerie établi sur de nouvelles bases, mis à la portée de tous, ce serait l’article camelote, la parfumerie pour bazar, laissée à très bon prix,