Aller au contenu

Page:Huysmans - En rade.djvu/219

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ses transes et bercer l’insomnie de ses pensées tristes. On était si loin de tout, si caché, si seul ! Il suivit, dans les hautes herbes, un hésitant sentier qui menait à une porte creusée dans le flanc de l’église ; avec sa clef il l’ouvrit et déboucha dans une nef badigeonnée au lait de chaux.

Cette église était en longueur, sans transept simulant les bras d’une croix, formée simplement par quatre murs le long desquels de minces colonnes disposées en faisceaux s’élançaient jusqu’aux arceaux des voûtes. Elle était éclairée par des rangées de fenêtres se faisant face, des fenêtres en ogive à courtes lancettes, mais dans quel état ! les pointes des lancettes cassées, rafistolées avec des morceaux de ciment et des bouts de briques, les verrières remplacées par des vitres divisées en de faux losanges de papier de plomb ou laissées, telles quelles, vides, la voûte éraillée perdant les eschares de sa peau de plâtre, pliant, surmenée, sous la pesée du toit.

Il se trouvait dans une ancienne chapelle de style gothique démolie par le temps et mutilée par des maçons. Au-dessus du chœur, une poutre carrée traversant l’édifice, d’une croisée à l’autre, supportait un immense crucifix dont le bas était vissé dans la poutre par des écrous de fer. Le Christ barbarement taillé, enduit d’une couche de