Page:Huysmans - En rade.djvu/220

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

peinture rose, avait l’air d’un bandit barbouillé de sang pauvre ; mal attaché sur sa croix, il tanguait au moindre vent, en criant sur ses clous qui jouaient du crâne aux pieds, de longs filets de fiente le sillonnaient, s’accumulant près de la blessure de son flanc dont la couleur plus épaisse faisait rebord. Les chats-huants et les corbeaux entraient librement dans l’église par les trous des vitres, perchaient sur ce Christ et, battant de l’aile, le balançaient, en l’inondant de leurs jets digérés d’ammoniaque et de chaux ! Sur le pavé du sanctuaire, sur les stalles pourries de bois, sur les bancs de l’autel même, c’était un amas de blanches immondices, une vidange d’oiseaux carnivores, ignoble !

Jacques s’approcha de l’autel dont les planches à peine rabotées s’apercevaient sous les linges empesés par le guano et compissés par des éclats de pluie ; il était surmonté d’un tabernacle constellé de même qu’une enveloppe de biscuits d’hospice, d’étoiles en argent sur un fond bleu, de flambeaux munis de faux cierges en carton et de vases égueulés, privés de fleurs.

Un fumet de charogne encensait l’autel. Guidé par cette odeur, Jacques passa derrière le tabernacle et vit, par terre, des restes de mulots et de souris, des carcasses sans têtes, des bouts de