Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/191

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partir. — À moins pourtant que ce ne soit le châtiment préparé, l’expiation voulue ; et encore non, car ce serait prêter à Dieu d’impitoyables ruses et c’est absurde !

Quant à la cuisine, peu importe qu’elle soit inhumaine si mon estomac la digère ; mal manger, se lever dans la nuit, ce n’est rien, pourvu que le corps l’endure ; je trouverai bien moyen aussi de fumer des cigarettes, en contrebande, au fond des bois.

Enfin huit jours sont bien vite écoulés et je ne suis même pas forcé, si je me sens défaillir, d’y résider huit jours !

Au point de vue spirituel, je dois bien encore tabler sur la miséricorde divine, croire qu’elle ne m’abandonnera pas, qu’elle me débridera les plaies, qu’elle me modifiera le fond de l’âme. Oui, je sais bien, ce sont des arguments qui ne reposent sur aucune certitude terrestre ; mais pourtant si j’ai des preuves que déjà la Providence s’est immiscée dans mes affaires, je n’ai pas de raisons pour juger que ces arguments sont plus débiles que les motifs purement physiques qui servent à étayer mon autre thèse. Or, il faut se rappeler cette conversion si en dehors de ma volonté, il faut enfin tenir compte d’un fait qui devrait m’encourager, de la faiblesse des tentations que maintenant j’éprouve.

Il est difficile d’avoir été plus rapidement et plus complètement exaucé. Que je doive cette grâce à mes propres prières ou à celles des couvents qui m’ont défendu, sans me connaître, toujours est-il que, depuis quelque temps déjà, ma cervelle se tait et que ma chair est calme. Ce monstre de Florence m’apparaît bien encore, à certaines heures, mais elle ne s’approche plus, elle de-