Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/274

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Et derrière cette sentine, d’autres s’étendaient. Tous les districts des péchés qu’énumérait patiemment le paroissien, il les avait traversés ! il ne s’était jamais confessé depuis sa première communion et c’était, avec l’entassement des années, de successives alluvions de fautes ; et il pâlissait à l’idée qu’il allait détailler à un autre homme toutes ses saletés, lui avouer ses pensées les plus secrètes, lui dire ce qu’on n’ose se répéter à soi-même, de peur de se mépriser trop.

Il en sua d’angoisse ; puis une nausée de son être, un remords de sa vie le souleva et il se rendit ; le regret d’avoir si longtemps vécu dans ce cloaque le crucifia ; il pleura longtemps, doutant du pardon, n’osant même plus le solliciter, tant il se sentait vil.

Enfin il eut un sursaut ; l’heure de l’expiation devait être proche ; sa montre marquait, en effet, dix heures moins le quart. A se laminer ainsi, il avait agonisé pendant plus de deux heures.

Il rejoignit précipitamment la grande allée qui conduisait au monastère. Il marchait, la tête basse, en refoulant ses larmes.

Il ralentit un peu le pas, lorsqu’il atteignit le petit étang ; il leva des yeux suppliants vers la croix et, les baissant, il rencontra un regard si ému, si pitoyable, si doux qu’il s’arrêta ; et le regard disparut avec le salut du convers qui continua son chemin.

Il a lu en moi, se dit Durtal. — Oh ! il a raison de me plaindre, le charitable moine, car vraiment ce que je souffre ! ah ! Seigneur, être comme cet humble frère ! cria-t-il, se rappelant avoir remarqué, le matin même, ce jeune et grand garçon, priant, dans la chapelle, avec