Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/199

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les uns pour tirer la brosse à dents de sa moustache, les autres pour caresser la boule lisse de son crâne. Sa femme était d’une distinction problématique et sa fille d’une laideur sûre ; elle ressemblait à la maman, avec quelque chose de plus provincial encore et de plus gnolle ; et le fils, un bon jeune homme, instruit dans les plus dévotes institutions, se balançait debout, les mains gantées, sur le pommeau de sa canne dont l’extrémité s’enfonçait dans la paille malade de la chaise.

On se demandait si ces gens savaient lire, car ils n’avaient aucun livre et se bornaient à égrener, qu’ils fussent, à la messe, aux matines ou aux vêpres, de précieux chapelets, montés sur argent, et qui simulaient, avec le cliquetis de leurs médailles, un bruit de cheval secouant son mors.

Et, tout à coup, l’orgue éclata en une marche triomphale ; l’Abbé pénétrait dans la nef, précédé de deux maîtres des cérémonies entre lesquels marchait le porte-crosse, en aube, les épaules couvertes de la vimpa, une écharpe de satin blanc à revers de soie cerise dont les très longs pans, ramenés sur la poitrine, servaient à envelopper la tige de la crosse ; et l’Abbé dont la grande traîne noire était portée par un novice bénissait, au passage, les fidèles agenouillés qui se signaient.

Et lui-même était allé se mettre à genoux sur le prie-dieu et toute sa cour de cérémoniaires, de chapiers, de religieux en aube, s’agenouillait aussi et l’on ne voyait plus qu’une volute d’or, dominant un champ de lunes mortes, la crosse debout au-dessus des larges tonsures, rondes et blanches, des têtes.

À un signal du P. d’Auberoche, frappant légèrement