Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/264

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Cindre, le successeur des reclus de Lyon et, moi, le successeur des oblats du Val des Saints, nous formons la paire. Il me semble que nous sommes à de vrais moines ce que sont à de vrais soldats, ces hideux mioches que des familles égarées affublent de costumes militaires et promènent par les rues, une trompette dans la bouche et une chandelle sous le nez.

Il rentra chez lui et trouva Mme Bavoil exacerbée.

— Je ne comprends pas, grognait-elle, que des femmes ne puissent être admises à votre profession ; moi, je suis tertiaire de saint François et l’on n’use pas de pareilles cachotteries dans cet Ordre.

— Mais les Franciscains ne sont pas en clôture, ma bonne madame Bavoil.

— Je n’en sais rien, je ne sais qu’une chose, c’est que demain, moi, et, ce qui est plus violent encore, votre sœur l’oblate, Mlle de Garambois, nous sommes tenues à l’écart, dans l’impossibilité de prier près de vous.

— Vous prierez à distance, Madame Bavoil ; d’ailleurs, si vous voulez vous rendre compte de la souveraine beauté que dégage une profession monastique, ce n’est pas celle de l’oblature qu’il faudrait voir ; elle n’est qu’un abrégé, qu’un raccourci, qu’une dilution homœopathique de celle des moines — et ce n’est même pas encore à celle des Bénédictins, qui est superbe pourtant, mais à celle des moniales qu’il siérait d’assister.

L’altitude absolue de la liturgie et de l’art est là. La profession des moniales de saint Benoît ! Il y a des moments où, pendant l’extraordinaire cérémonie, le petit frisson de la splendeur divine vous fait trémuler l’âme