Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/303

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l’on soutient des enfants levés dès l’aube et debout jusqu’au soir.

Et moi-même, dont l’abstinence fut presque aussi rigoureuse, car, faute de poisson au Val des Saints, j’ai dû me contenter, les jours où les œufs étaient interdits, de légumes, je me sens débilité, l’estomac en charpie, et je ne suis pas fâché d’attaquer, à mon tour, le gigot de ce mouton rebelle et je suis plus satisfait encore de reprendre mes habitudes, de retrouver mes vêpres remises à quatre heures, c’est-à-dire à une heure facile, au lieu de ces onze heures et demie qui me laissaient une heure inoccupée que je ne savais à quoi employer, après la messe terminée à dix heures.

Il me fallait, en attendant, remonter chez moi ou traîner dans le village ; nous rentrons enfin dans la norme à partir d’aujourd’hui, alleluia !

Et, après le dîner, quand, au retour de la chapelle, il fut réuni dans la salle des hôtes pour boire le café avec le P. Abbé, Dom de Fonneuve, Dom Felletin, Dom Badole, le curé et son ami, M. Lampre, Durtal se sentit débordé par un bien-être dont il eût été incapable d’analyser les causes ; elles étaient, à vrai dire, multiples ; il y avait l’entrain agissant d’un cloître possédé par cette joie liturgique qui se déversait depuis le matin dans les offices ; il y avait la satisfaction d’un homme libéré d’exercices incommodes et de repas pénibles ; il y avait enfin l’enjouement de la température qui devenait, au sortir des frimas, clémente, car la nature ressuscitait avec le Christ.

Il faisait presque doux. Durtal s’était promené, avant la messe, dans son jardin ; la petite allée du bois était