Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/365

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sous un aspect spécial, car elle remettait en avant, à propos d’elle, le terrible problème de la Douleur.

N’avait-elle pas, en effet, joué un rôle étrange — immense à la fois et limité dans la vie de la Vierge ?

Pour essayer de comprendre la raison d’être de cette effroyable bienfaitrice, de cette salutaire Euménide, il fallait remonter aux premiers âges du monde, entrer dans cet Eden où, dès qu’Adam eut connu le péché, la douleur surgit. Elle fut la première-née de l’œuvre de l’homme et elle le poursuivit depuis lors sur la terre, par delà le tombeau, jusqu’au seuil même du Paradis.

Elle fut la fille expiatrice de la désobéissance, celle que le baptême qui efface la faute originelle, n’arrêta pas. Elle ajouta à l’eau du sacrement l’eau des larmes ; elle nettoya les âmes, autant qu’elle le put, avec les deux substances empruntées au corps même de l’homme, l’eau et le sang.

Odieuse à tous et détestée, elle martyrisa les générations qui se succédèrent ; de père en fils, l’antiquité se repassa la haine et la peur de cette préposée aux œuvres divines, de cette tortionnaire, incompréhensible pour le paganisme qui en fit une déesse mauvaise, que les prières et les présents n’apaisaient pas.

Elle marcha sous le poids de la malédiction de l’humanité pendant des siècles ; lasse de ne suggérer, dans sa besogne réparatrice, que des colères et des huées, elle attendit, elle aussi, avec impatience la venue du messie qui devait la rédimer de son abominable renom et détruire ce stigmate exécré qu’elle portait sur elle.

Elle l’attendait comme le Rédempteur et aussi comme le fiancé qui lui était destiné depuis la chute et elle ré