Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/421

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même au Val des Saints, où l’on se disséminait en de petits paquets ; les moines rassis, hochaient la tête disant : la population de Solesmes vaut mieux que la nôtre, et encore faudra-t-il s’assurer, une fois que les Bénédictins auront le dos tourné, si ces gens ne s’allieront pas avec leurs adversaires ! L’on causait aussi de l’embarquement pour l’île de Wight des moniales de sainte Cécile : c’était l’abandon complet de ce Solesmes que Dom Guéranger avait tant aimé !

Et sans espoir de retour, pensait Durtal, car avant qu’il ne soit longtemps l’abbaye de saint Pierre sera vendue par le gouvernement et prise.

Le moment du départ du noviciat, au Val des Saints, approchait. L’on résolut de célébrer au moins, avant que cette avant-garde n’eût quitté le cloître, un dernier office pontifical ; le curé offrait l’église pour la veille même de la mise en route des novices, pour le dimanche, fête de Notre-Dame des Sept Douleurs ; et cette festivité de tristesse semblait bien choisie pour dire à jamais adieu à l’église, car, à partir du lendemain, les pères, trop peu nombreux pour tenir le chœur, devaient rester chez eux et œuvrer les offices dans l’oratoire.

Ce dimanche, les paysans des environs arrivèrent. Presque tous étaient socialistes et n’avaient cessé de réclamer la suppression des congrégations ; mais ils sentaient que la fermeture du monastère était la ruine du pays et des alentours. Tous vivaient de ces frocs détestés, les pauvres, surtout, qui déposaient leurs paniers à la porterie, les remportaient pleins et avaient ainsi leur nourriture assurée de chaque jour.

Ces gens étaient, à la fois, marris et furieux ; leur