Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/96

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sa petite bouche et une fossette dansait, ingénue, et pourtant avec un petit air de se ficher du monde, dans le menton. Penchée, un peu en avant, les deux mains sur les bras du fauteuil, en une pose qu’elle affectionnait, Mlle de Garambois remuait alors un peu la tête et la figure de la fillette aimable et espiègle dont elle avait l’âme, surgissait. Elle avait, en effet la gaieté de l’enfant et son innocence ; et elle avait surtout une bonté et une charité qui la faisaient, elle qui se traînait si péniblement, courir tout le village afin de panser les plaies et de changer le linge des malades. Cette femme, si soignée pour elle-même, qui, chez elle, aurait sans doute hésité à laver la vaisselle, perdait tout dégoût ou plutôt le surmontait, quand il s’agissait de rendre service ; et dieu sait, chez les paysans malades, auprès de femmes et d’enfants négligés, les répugnantes besognes qu’elle devait accomplir !

— Ce que vous avez raté votre vocation, lui disait parfois son oncle, M. Lampre ; vous auriez dû être sœur dans un hôpital.

— Je n’aurais pas eu l’office divin ; — puis se raillant, elle-même — elle ajoutait avec son pimpant sourire : ni de bons petits plats !

Elle était très bien avec Mme Bavoil, qu’elle désespérait pourtant. Elle a tout ce qui faut pour devenir une sainte, disait celle-ci, et le diable, en la dominant par cette damnée gourmandise, l’empêche d’avancer et on le lui répète sur tous les tons et elle est si aveuglée qu’elle ne vous écoute pas ; — Et doucement, gentiment, sans se lasser, elle essayait quand même de la guérir ; mais Mlle de Garambois prenait guillerettement les remontrances