Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/183

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tut ; — puis elle ajouta : Oui, ne se voir qu’ainsi, — et si l’on n’a pas de choses sublimes à se dire, on se tait ; c’est encore très bon de ne rien dire !

Elle soupira, puis : — l’heure passe, il faut pourtant que je rentre !

— Et sans me laisser rien espérer ? fit-il, en embrassant ses mains gantées.

— Dites, vous reviendrez ?

Elle ne répondait pas, remuait doucement la tête ; alors comme il devenait suppliant :

— Écoutez, si vous me promettez de ne rien me demander, d’être sage, après-demain soir je viendrai, à neuf heures, ici.

Il promit tout ce qu’elle voulut. Et comme il promenait son souffle plus haut que les gants, que sa bouche courait sur la gorge qu’il sentait debout, elle dégagea ses mains, prit les siennes qu’elle maintint nerveusement, en serrant les dents, et elle lui tendit le cou qu’il baisa.

Elle s’enfuit.

— Ouf ! fit-il, en refermant sa porte ; il était, tout à la fois, satisfait et mécontent.

Satisfait — car il la trouvait énigmatique et variée, charmante. Maintenant qu’il était seul, il se la remémorait, serrée dans sa robe noire, sous son manteau de fourrures dont le collet tiède l’avait caressé, alors qu’il l’embrassait le long du cou ; sans bijoux, mais les oreilles piquées de