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Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/200

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réincarnent et qu’elles parviennent, d’avatars en avatars, à une pureté complète. Eh bien, cela me paraît suffisant de vivre, une fois ; j’aime mieux le néant, le trou, que toutes ces métamorphoses, ça me console plus ! Quant à l’évocation des morts, la pensée seule que le charcutier du coin peut forcer l’âme d’Hugo, de Balzac, de Baudelaire, à converser avec lui, me mettrait hors de moi, si j’y croyais. Ah ! non, tout de même, si abject qu’il soit, le matérialisme est moins vil !

— Le Spiritisme, c’est, sous un autre nom, l’ancienne Nécromancie condamnée, maudite par l'Église, dit Carhaix.

Gévingey regarda ses bagues, puis il vida son verre.

— En tout cas, reprit-il, vous avouerez bien que ces théories sont soutenables, celle des élémentals surtout qui, satanisme mis à part, semble la plus véridique, la plus claire. L’espace est peuplé de microbes ; est-il plus surprenant qu’il regorge aussi d’esprits et de larves ? L’eau, le vinaigre, foisonnent d’animalcules, le microscope nous les montre ; pourquoi l’air, inaccessible à la vue et aux instruments de l’homme, ne fourmillerait-il pas, comme les autres éléments, d’êtres plus ou moins corporels, d’embryons plus ou moins mûrs ?

— C’est peut-être pour cela que les chats regardent tout à coup, avec curiosité dans le vide et