Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/220

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Il ne s’était pas trompé ; le concierge avait bousculé le ménage avec la même brutalité, la même hâte que de coutume. Pourtant, il avait essayé de nettoyer les vitres des cadres, car des traces de doigts marquaient les glaces.

Durtal essuya avec un linge mouillé ces empreintes, défit les plis en tuyaux d’orgue des tapis, tira ses rideaux, polit avec un torchon les bibelots qu’il mit en ordre ; partout il constatait de la cendre écrasée de cigarette, de la poudre de tabac, des copeaux de crayons taillés, des plumes privées de becs et mangées de rouille. Il découvrait également des cocons de poils de chat, des brouillons déchirés, des morceaux de papier épars, lancés à coups de balai, dans tous les coins.

Il en venait à se demander comment il avait pu si longtemps tolérer des meubles obscurcis et glacés par les crasses — et à mesure qu’il époussetait, son indignation s’augmentait contre Rateau. — Et ça ! fit-il, apercevant ses bougies devenues jaunes ainsi que des chandelles. Il les changea. — Là, voyons, c’est mieux. — Il organisa le désarroi convaincu de son bureau, espaça des cahiers de notes, des livres traversés par des coupe-papiers, posa un vieil in-folio ouvert sur une chaise. — Le symbole du travail ! se dit-il, en riant. — Puis il passa dans sa chambre à coucher, rafraîchit avec une éponge humide le marbre de la commode, lissa