Aller au contenu

Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/305

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fragile, elle exigeait de multiples précautions, de constants soins.

— Vous devez avoir des soirs bien douloureux, reprit-elle, d’une voix émue, derrière le rideau.

— Oh oui ! pensez donc, si demain je mourais, que deviendraient ces malheureuses ?

Il s’emballa, finit par croire à l’existence de l’enfant, s’attendrit sur la mère et sur elle ; sa voix trembla ; des larmes lui vinrent presque aux yeux.

— Il n’est pas heureux, mon ami, dit-elle en soulevant la portière et en rentrant habillée, dans la pièce. C’est donc pour cela que même lorsqu’il sourit, il a l’air si triste !

Il la regardait ; à coup sûr, à ce moment, son affection ne le dupait pas ; elle tenait vraiment à lui, pourquoi fallait-il qu’elle éprouvât ces rages de luxure ; on aurait peut-être pu sans cela rester camarades, pécher modérément ensemble, s’aimer mieux que dans la voirie des chairs ; mais non, cela n’est pas possible, conclut-il, voyant ces yeux sulfureux, cette bouche spoliatrice, terrible.

Elle était assise près de son bureau et jouait avec un porte-plume.

— Vous étiez en train de travailler quand je suis venue ? où en êtes-vous sur Gilles de Rais ?

— Il avance, mais je suis retardé ; pour bien faire le satanisme au Moyen Âge, il faudrait se