Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/75

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Ils étaient assis dans la salle à manger, aussi maussade que les autres pièces mais plus chaude, car un poêle de faïence y ronflait, soufflant, par ses bouches de chaleur, des trombes.

Après qu’ils eurent mangé leurs œufs à la coque, la conversation, qui s’était jusqu’alors éparpillée au hasard des sujets, se concentra sur la cathédrale.

— Elle est la cinquième édifiée sur la grotte des Druides, dit l’abbé Plomb ; son histoire est étrange.

La première, érigée du temps des Apôtres, par l’évêque Aventin, fut rasée jusqu’au niveau du sol. Rebâtie par un autre prélat du nom de Castor, elle fut brûlée, en partie, par Hunald duc d’Aquitaine, restaurée par Godessald, incendiée à nouveau par Hastings, chef des Normands, réparée, une fois de plus, par Gislebert et enfin complètement détruite par Richard, duc de Normandie, lors du siège de la ville qu’il mit à sac.

Nous ne détenons pas de bien véridiques documents sur ces deux basiliques ; tout au plus, savons-nous que le gouverneur romain du pays de Chartres démolit de fond en comble la première, égorgea un grand nombre de chrétiens, au nombre desquels sa fille Modeste, et fit jeter leurs cadavres dans un puits creusé près de la grotte et qui a reçu le nom de puits des Saints Forts.

Un troisième sanctuaire, construit par l’évêque Vulphard, fut consumé en 1020, sous l’épiscopat de saint Fulbert qui fonda une quatrième cathédrale ; celle-ci fut calcinée, en 1194, par la foudre qui ne laissa debout que les deux clochers et la crypte.

La cinquième enfin, élevée sous le règne de Philippe-