Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/114

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bonnait et l’égouttement de sa salive dans le crachoir. Elles étaient tout désorientées, Céline surtout qui n’aimait guère à raccommoder le linge, tournait les pouces, allait du buffet à la croisée, se penchait sur la balustrade, enfilant d’un coup d’œil la rue Vandamme.

Leur maison était proche du coin, naturellement planté de barreaux rouges et de raisins en tôle bleue, de cette rue et de la rue du Château. Leur chambre, à elles, prenait jour derrière le logis, sur la voie du chemin de fer de l’Ouest. À cet endroit la ligne était coupée par un pont suspendu et grillagé à hauteur d’homme et, au-dessous, un passage à niveau s’ouvrait pour les voitures, surmonté d’une tour en bois, agrémentée d’horloges.

Pendant les premiers temps, les jeunes filles avaient trouvé tout ce grouillement, toute cette vie de machines très divertissants. Aujourd’hui qu’elles étaient habituées au bruit, elles ne constataient plus qu’un insupportable inconvénient, celui d’avoir à foison chez soi de la poussière de charbon et de la fumée noire.

Souvent elles s’étaient aperçues, en se peignant, que les dents de l’outil criaient, ramenant de leur tête ces escarbilles qui se nichent dans les cheveux et la barbe des gens perchés à une portière lorsqu’un train détale. Elles étaient