Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/152

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perdu toute sa timidité, et qu’il se moquait bien de son tableau, à ce moment-là !

Au fond, il était devenu aussi enragé qu’Anatole. Il n’y mettait pas plus de façons ; il m’appelait « poulette » avec le même ton que l’autre avait quand il me disait « ma gosse ». C’est étonnant comme tous les hommes se ressemblent ! Je suis sûre que l’empereur, quand il était dans leur position, ne faisait pas autrement qu’eux ; ils ont tous la manie de vous prendre la tête entre les mains et de l’embrasser avec des lenteurs ; enfin !

Ah ! et puis, tu sais, il a eu l’air de s’apercevoir que ma robe était usée ; il est probable qu’il m’en achètera une ; je compte aussi sur un chapeau, car j’ai bien vu que ça le vexait que je vienne toujours en cheveux. Il y a justement au Bon Marché des étoffes superbes, rayées, bleues et noires ; on en ferait une robe serrée, une de ces robes comme en a Rosine, qui font un bruit de feuilles lorsque l’on marche. Seulement, ça coûte cher ; enfin, tant pis, j’en veux une comme celles-là. C’est Rosine qui ragera lorsqu’elle me verra aussi bien nippée qu’elle !

— Mais, hasarda la petite, il ne doit pas être riche s’il est peintre, ton monsieur ; il ne pourra peut-être pas te payer une robe aussi belle ?

— Laisse donc, reprit l’autre, Cyprien doit avoir de l’argent, car il a chez lui un tas de