Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/177

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autres, et puis, comme disait Céline, en allongeant sa pièce, nous n’avons plus à nous gêner entre nous, nous sommes maintenant en famille.

Il resta très ahuri. Il eût à coup sûr mieux aimé rester garçon, préféré avoir Désirée comme maîtresse plutôt que de l’avoir tout de suite pour femme, mais il savait parfaitement que c’était impossible. Elle ne lui avait pas caché d’ailleurs sa façon de penser là-dessus ; mais c’est égal, il eût voulu pouvoir prolonger ainsi la situation, comptant sur un hasard, sur n’importe quoi. D’un autre côté ce n’était pas une vie que d’être toujours sans le sou ; or Désirée était un parti avantageux, puis cela ferait plaisir à sa mère qui, ainsi que la plupart des femmes impotentes et vieilles, aspirait à voir marier son fils. Il se ratiocinait toutes ces raisons, se ressassant : J’ai dit oui, je vais sauter le fossé, mais comment faire ? Et, malgré tout, l’idée qu’il allait perdre sa liberté le chagrinait. Il en venait à espérer par moments que Vatard s’opposerait au mariage et, une minute après, quand il se représentait le tableau dépeint par Céline : une chambre propre et claire, Désirée en caraco blanc, l’époussetant, toute fière de ses meubles, il avait peur d’être refusé.

Ballotté à gauche, à droite, ne voulant pas et voulant plutôt, il finissait par être très abasourdi.