Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/22

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avec du lilas sur le ventre et du carmin aux doigts, des Jésus bénisseurs, frisottés et blonds, les bras en avant, accueillants et bien vêtus, puis, sur le rayon du bas, des Saints-Sacrements, des patènes, des ciboires, resplendissaient avec leurs dorures et leurs mosaïques ; des veilleuses étranges, des cœurs en verre rouge, montés sur du bronze, des lys aux pistils et aux tiges de cuivre, des vases avec des J. M. entrelacés et des bouquets de roses, en papier blanc, s’empilaient sur une cloison, encadrant un petit Rédempteur, de cire rose, qui batifolait sur de la paille, serré comme un joujou de vieille femme, sous un globe de verre.

Et tous ces magasins s’échelonnaient, diminuant en splendeur, à mesure que la rue s’acheminait vers le boulevard.

Ici, là, alternant avec eux, béaient sur le trottoir des boutiques de marchands de vins, avec des tonneaux vernissés le long des murs, et des grilles cramoisies aux vitres. À cette heure, ils regorgeaient de monde. Des poivrots, le coude sur le zinc, riaient au nez des petites avec des yeux fripés et des mâchoires violies par le gros vin. Céline fit bouffer sa jupe et pimpa des prunelles, se retournant, appelant sa sœur qui rêvait tout haut devant la montre d’un herboriste, admirant des colliers d’ambre, des irrigateurs