Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/225

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À l’aspect de ces murs qui avaient vu défiler tant de sabbats de vagabonds, tant d’amours bestiales, tant de misérables nuits ; à l’aspect de cette cheminée qui se gerçait et brûlait sans tirage, de ces quelques flammes qui, se coulant derrière les bûches mal rapprochées, léchaient la plaque du fond que n’abritait aucune cendre, un grand frisson leur courut dans le dos.

Comme un psaume de lamentation, la sépulcrale horreur des hôtels meublés s’éleva de cette bauge sordide. Auguste et Désirée eurent dans l’âme comme un carnage de toutes leurs pensées de ferveur et de paix. Le jeune homme versa du vin à la petite, mais elle n’avait pas soif ; lui, s’engorgea précipitamment des rasades, puis il rapprocha son siège et, le sang aux joues, les mains tremblantes, brusquement il la troussa. Elle eut une lueur à ce moment. Elle se débattit criant : — Je ne veux pas, moi ! laisse-moi !

Il la lâcha, honteux de sa violence, et la supplia de lui pardonner, ne se doutant point qu’attisée comme elle était, elle se serait elle-même offerte, s’il avait seulement fait mine de vouloir la reprendre.

Cette soirée donna à réfléchir à Désirée. Malgré toutes ses belles résolutions des anciens jours, elle eût été perdue si Auguste avait été plus brave. Elle s’avoua qu’elle n’avait plus vu clair à un