Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/275

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rapportait que deux. Ils n’en étaient, ni moins à l’aise, ni moins contents. — Auguste les enviait de toutes ses forces, maudissait cette espèce d’aristocratie ouvrière, ces hommes comme Vatard, qui, parce qu’ils ont quelques sous et une fille âpre au travail, ne la veulent marier qu’à un ouvrier hors ligne, et puis, plus il réfléchissait, moins il voyait d’issue à ses amours avec Désirée.

Il apercevait maintenant le fond de l’impasse où il était entré. Il devait ou retourner sur ses pas ou se butter contre les murs. — Découvrir un emploi plus lucratif que le sien ? il n’y fallait plus prétendre. Il avait, par tous les moyens possibles, tenté de remplir l’office de voiturier, dans une maison de brochure, une bonne place celle-là ! soixante francs par quinzaine, le profit du fumier vendu, les pourboires cachés, les rabiaus sur le fourrage, les petits bénéfices chez les éditeurs pour porter, le dimanche, leurs prospectus aux bureaux de poste. — Partout il avait échoué.

Un jour ou l’autre, son salaire pourrait s’augmenter un peu, mais ce serait tout. En travaillant d’arrache-pied, il touchait, en moyenne, quatre fr. quatre-vingt centimes par jour. Il se faisait donc un gain presque égal à celui de son ami. Il occupait son temps à comparer sa situation à la sienne. — Il retournait voir souvent ce camarade, passait la soirée avec ses parents, et la sœur de sa femme,