Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/29

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pirouettant sur une patte, glapit : — Mademoiselle Désirée, quand donc que vous me permettrez de vous faire la cour ?

Mais Désirée ne l’entendait guère, elle pleurait à force de bailler, se tirait les doigts, tendait les genoux ; ce fut Céline en train de s’embrasser en godinette avec Anatole qui répondit : — C’est des mistoufles tout ça ! Qu’est-ce que vous offrez ? Votre cœur ? Il n’y a que les gens qui n’ont que ça qui le proposent ! Ça ne suffit pas, vous pouvez aller vous faire lanlaire !

Colombel rit de travers dans sa barbe trop drue. Anatole, très réjoui, soupesa la poitrine de sa femme et cria : — À papa tout le paquet ! Colombel retourna s’asseoir et brassa derechef les dominos. La porte s’ouvrit et deux hommes entrèrent. Ils avaient arboré des costumes de dimanche, des costumes à prendre sur le bras des bourgeoises, à aller faire la vendange du campêche chez les mastroquets. Ils avaient des tape-à-l’œil flambant neufs, des pantalons à raies avec des pièces entre les cuisses, des redingotes échouées et radoubées au temple, des cravates en cordes. — Ils serrèrent la main à la société, blaguèrent Céline qui, le nez dans son verre de vin chaud, mordillait le zeste du citron quand la rondelle lui venait aux lèvres et s’asseyant, en face l’un de l’autre, un litre et deux verres entre eux, ils