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Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/295

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s’était juré d’être énergique, n’eut même pas la hardiesse de demander à sa bonne amie de l’embrasser. Inconsciemment, chacun pressentait qu’il n’était plus aimé. Une gêne grandissante les tenait là, les yeux baissés, la bouche sèche. Céline rompit le silence. — Si nous allions prendre un vermouth, hein ? ça vous va-t-il, Auguste ?

Ils accueillirent cette proposition comme une délivrance. Ils s’installèrent au café qui fait l’angle du boulevard St-Germain et du quai de la Tournelle ; et, puisqu’il fallait causer, Auguste s’inquiéta de la santé de Madame Vatard. — Elle se portait bien. — Ce colloque dura cinq minutes ; après quoi il se fit encore un long temps de silence.

— Tiens, s’écria tout à coup Auguste, voilà notre amie de la rue du Cotentin ! Ils la hélèrent et Auguste l’invita à prendre un verre avec eux ; mais elle était pressée. Ils s’enquirent de son amoureux. Elle eut un geste très dégagé. — Je ne sais pas, il doit toujours être en garnison à Dax ; il m’a écrit plusieurs fois mais j’ai changé de domicile, je n’ai pas donné ma nouvelle adresse et j’ai oublié d’aller chercher ses lettres. Il doit être en bonne santé ; il n’y a pas de raison d’ailleurs pour qu’il se porte mal ; mais, faites excuse, je me sauve, je suis attendue.

— Eh bien, c’est toujours comme cela l’amour,