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Page:Huysmans - Marthe, histoire d'une fille, 1876.djvu/136

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soit pour Cythère ; après le dîner enfin, tout le monde descendait au salon et, debout sur le seuil, la mère Jules guettait.

Il venait deux, trois, vingt personnes ; on demandait à boire, on montait au premier, puis le timbre sonnait et toutes se bousculant, se chatouillant, se pinçant, dégringolaient l’escalier, quatre à quatre, faisant tourbillonner dans la vapeur rouge des gaz leurs oripeaux de théâtre ou se découpant, blanches et nues, sur le faux marbre des murailles.

On atteignait ainsi onze heures, la table était prête pour le souper, et tout l’escadron remontait et s’empiffrait des rondelles de cervelas, des tartines de rillettes, des parts de lapin aux pommes, et le timbre retentissait encore ; chacune avalait le morceau qu’elle avait en bouche, et pour la vingtième fois, elles s’engouffraient avec un bruit de tempête dans la salle du marché, puis remontaient, sauf une ou deux, qui rentraient plus tard les bas luisants de pièces d’argent ou d’or.

Mais c’était vers une heure du matin que le délire atteignait son intensité suprême. Les passagers affluaient ; alors les gambades et les cabrioles, les piétinements et les huées ne cessaient plus,