Page:Huysmans - Marthe, histoire d'une fille, 1876.djvu/32

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même plus dans cet habitacle, les vases d’albâtre et de porcelaine peinte, la pendule sans aiguilles, la glace piquée par des chiures de mouches ; il n’y avait même plus ce dernier luxe des hôtels garnis, la gravure coloriée de Napoléon, blessé au pied et remontant à cheval ; les murs déshabillés pissaient des gouttelettes jaunes et le carreau, avec ses plaques de vernis écarlate, semblait une peau malade marbrée d’érosions rouges. Pour tout mobilier, un lit en bois sale, une table sans tiroir, des rideaux de perse bituminés et raidis par la crasse, une chaise sans fond et un vieux fauteuil qui se rigolait seul, près de la cheminée, riant par toutes ses crevasses, tirant comme pour les narguer, ses langues de crin noir par toutes les fentes de ses gueules de velours.

Ils y restèrent pendant huit semaines, vivant d’expédients, buvant et mangeant d’inénarrables choses. Marthe commençait à envier un autre sort, quand elle découvrit qu’elle était enceinte de plusieurs mois. Elle fondit en larmes, avoua à son amant que l’enfant n’était pas de lui, dit qu’elle lui rendait toute sa liberté, se l’attacha irrémédiablement par cette feinte et, d’accord avec le malheureux, se résolut à se priver du superflu