Page:Huysmans - Marthe, histoire d'une fille, 1876.djvu/93

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s’il eût quitté Paris pour un motif autre que celui qui l’en avait fait partir, il eût considéré cette échappée comme un collégien considère les vacances qui le délivrent de l’asservissement des maîtres.

L’oisiveté qu’il mena dans la petite maison de sa mère ramena forcément ses pensées vers Paris. Il se rappela les joyeux dîners, les enfantillages des premiers jours, la traîtrise des luttes à coups de lèvres. De loin, tous les défauts de l’idole s’évanouirent ; il la voyait, en quelque sorte, idéalisée et plus belle qu’elle ne lui sembla jamais ; le poëte reparut dans l’amant, il replaçait sur un piédestal de déesse la poupée dont il avait entrevu le son sous la couverte de peau rose ; bref, il se mourait d’envie de l’adorer encore.

Il était avec cela miné par l’inquiétude. Toutes ses lettres étaient restées sans réponse et il craignait un malheur. Il en vint à ne plus tenir en place, à s’ennuyer partout ; sa mère était rétablie, rien ne le retenait plus à la campagne. Il partit.

Le chemin de fer, si lassant quand le trajet dure pendant une journée entière, accéléra encore son désir de revoir Marthe. En vain, il s’essayait à tuer l’interminable journée, s’efforçant de prendre