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voyageurs italiens s arrivèrent à Damas. Cette ville est entourée de murs, mais elle n’a de fossés que dans quelques endroits seulement ; elle possède de très-grands faubourgs, dont la population est plus nombreuse que celle de la ville même. (Conf. ci-dessous, p. 229-230.) Pendant le séjour de Frescobaldi à Damas, eut lieu le départ de la caravane de la Mecque, et le bon pèlerin florentin ne laisse pas échapper cette occasion de répéter la fable si répandue au moyen âge, et d’après laquelle Mahomet reposerait à la Mecque dans une caisse de fer. Il partit de Damas pour la Mecque environ vingt mille hommes, et on ne s’apercevait pas qu’il en fût sorti personne, tant étaient remplies de monde un grand nombre de rues. Damas a de très-bonnes eaux et très-abondantes ; elles viennent de plusieurs endroits, et surtout des coteaux de la colline où Caïn tua Abel[1]. L’auteur consacre quelques pages à l’industrie de cette ville, et dit ensuite :

« Nous restâmes à Damas environ un mois et fûmes très-bien accueillis par quelques Vénitiens et des Catalans, et surtout par leurs consuls. Ici tomba malade et mourut Andréa di Messer Francesco Rinuccini, notre troisième camarade, ainsi qu’un domestique… Nous quittâmes Damas le 29 janvier 1384 (ancien style, lisez 1385), nous dirigeant vers le mont Liban… Au nord du Liban se trouve Tripoli ; et les villes qui sont sur le littoral ont de bons ports. Nous partîmes de la plaine de Noé, en allant vers Beïroût et en gravissant une montagne escarpée, presque semblable à nos Alpes, où la neige dure à peu près toute l’année ; il y a des arbres de l’espèce des chênes. Au bas de la montagne, dans la direction de Beïroût, on trouve une très-grande forêt de pins, cultivée à la manière de nos pays, comme les forêts de Ravenne et de Chiassi. Nous arrivâmes à Beïroût au commencement du carême. Cette ville est un beau château, et il y a une citadelle très-bien entourée de murs et bien gardée. L’eau de la mer bat les murs du château, et il s’y trouve un bon port. Le pays est fertile et riche, et produit beaucoup de coton. » Frescobaldi logea à Beïroût dans une église qui lui avait été assignée par le consul des Vénitiens ; c’était celle du Sauveur. Il rencontra en cette ville messire Olivier de Cinchy, qui était venu du royaume de France pour faire le pèlerinage, et avait accompagné dans le royaume de Pouille le duc d’Anjou. Les voyageurs s’embarquèrent au mois

  1. Pages 128 à 173. Cf. ci-dessous, p. 231-235.