Ibn Batoutah a prévu le sentiment d’incrédulité que pourraient exciter certains de ses récits touchant la munificence extraordinaire de Mohammed. Mais il a eu soin, à deux reprises, de protester de sa véracité, et cela dans les termes les plus forts, les plus énergiques[1]. D’ailleurs ce qu’il dit à ce sujet est pleinement confirmé, tant par les témoignages de Khondémîr et de Firichtah, que par celui d’un historien arabe contemporain, dont nous avons parlé dans la préface du premier volume (p. xii et xiii). On remarquera même que l’auteur du Méçâlic alabsâr, écrivain judicieux et exact, mais qui, n’ayant jamais visité l’Inde, tenait ses renseignements de voyageurs et de marchands, peut-être portés à l'exagération, se montre beaucoup moins modéré qu’Ibn Batoutah dans les chiffres qu’il assigne aux largesses du sultan, et dans les descriptions qu’il trace de la magnificence de ce souverain[2].
Nous nous bornerons à deux ou trois remarques pour ce qui concerne cette portion de l’ouvrage. Ibn Batoutah atteste qu’il a été présent à la rentrée de Mohammed dans sa capitale, au retour de quelques voyages ; que, « dans ces circonstances, trois ou quatre petites balistes, dressées sur des éléphants, lançaient aux assistants des pièces d’argent et d’or, que ceux-ci ramassaient. « Cela, ajoute notre auteur, commença au moment de l'entrée du sultan dans la ville, et dura jusqu’à son arrivée au château[3] ». Une telle prodigalité peut paraître bien extraordinaire ; et cependant Khondémîr affirme, d’après Dhiyaï