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HISTOIRE DES BERBÈRES

à Cairouan l’an 124 (741-2), et ayant appris que la tribu des Hoouara, commandée par ses chefs, Okacha-Ibn-Aïoub et Abd-el-Ouahed-Ibn-Yezîd, était en révolte ouverte et marchait contre lui avec les partisans qu’elle avait trouvés parmi les autres populations berbères, il se mit en campagne, et arrivé à El-Carn, aux environs de Cairouan, il attaqua les insurgés si vigoureusement qu’il les mit en pleine déroute après avoir tué Abd-el-Ouahed et fait prisonnier Okacha. D’après ses ordres on compta les morts, et l’on reconnut que cent quatre-vingt mille hommes avaient succombé. Il adressa ensuite à Hicham une dépêche dans laquelle il lui annonça le triomphe de ses armes. Quand El-Leith-Ibn-Sâd[1] apprit la nouvelle de cette victoire, il s’écria : « Après la bataille de Bedr, c’est à la bataille d’El-Carn et El-Asnam que je voudrais avoir pris part. »

Bientôt après, la puissance du khalifat s’affaiblit dans l’Orient par suite des dissensions qui s’étaient élevées parmi les Oméïades, et des guerres que [le khalife] Mérouan [-Ibn-Mohammed] eut à soutenir contre les Chîites et les Kharedjites.

Il en résulta le remplacement de la dynastie oméïade par celle des Abbacides. Abd-er-Rahman-Ibn-Habîb, qui était alors en Espagne, traversa le Détroit et enleva à Handala la possession de l’Ifrîkïa. Ceci se passa en 126 (743-4).

De nouveaux désordres éclatèrent aussitôt dans ce pays : l’insubordination des Berbères, cette plaie de l’Afrique, devint plus redoutable que jamais, et les Kharedjites, sous la conduite de leurs chefs, déployèrent encore leur animosité contre l’empire. De tous les côtés ces populations coururent aux armes, et s’étant réunies en plusieurs corps, elles s’emparèrent de l’autorité, en proclamant leurs doctrines hérétiques. La tribu de Sanhadja commandée par Thabet-Ibn-Ouzîdoun[2] prit une part très-active

  1. Abou-’l-Hareth-el-Leith-Ibn-Sâd, mourut au Vieux-Caire en 175 (791 de J.-C.). On le regarde comme le traditionniste le plus savant et le plus exact que l’Égypte ait possédé. Sa vie se trouve dans le premier volume d’Ibn-Khallikan.
  2. Le mot Ouzîdoun est probablement la forme berbère du prénom arabe Ibn-Zeidoun (fils de Zeidoun).