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Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/371

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LES MATMATA — BENI-FATEN.

Par la prise de la capitale qu’ils avaient fondée et auprès de laquelle ils s’étaient établis, les Lemaïa perdirent toute leur puissance et durent se disperser en petites bandes pour aller vivre au milieu des autres tribus.

Un de ces débris, les Djerba, habite jusqu’à ce jour l’île qui est située vis-à-vis de Cabes et qui porte leur nom. Les chrétiens de la Sicile s’emparèrent de cette île après avoir subjugué et soumis à la capitation les Djerba, les Sedouîkich[1] et les autres peuplades ketamiennes et lemaïennes qui y habitaient. Ils y érigèrent, sur le bord de la mer, une forteresse où ils établirent leur siége de gouvernement et à laquelle ils donnèrent le nom d'El-Cachetîl (Castello). Pendant longtemps les armées envoyées par les Hafsides de Tunis s’acharnaient contre cette place forte, mais ce ne fut que vers l’an 738 (1337), sous le règne de notre seigneur [Abou-Yahya-] Abou-Bekr, que Makhlouf-Ibn-el-Kemad, un de ses officiers, s’en rendit maître. L’islamisme s’est conservé dans Djerba jusqu’à nos jours, mais la population berbère a constamment professé la religion kharedjite, doctrine hérétique dont on enseigne encore les principes dans leurs écoles. Ils possèdent des ouvrages composés par les grands docteurs de leur secte et dans lesquels ils trouvent exposés les articles fondamentaux de leur foi et le développement de leur loi religieuse. Ces volumes se transmettent de père en fils et sont l’objet d’une étude assidue.

Les Matmata, enfants de Faten-Ibn-Temsît et frères des Matghara et des Lemaïa, se partagent en plusieurs branches. Selon le généalogiste Sabec-el-Matmati et ses disciples, le père des Matmata se nommait Maskab, et avait pour surnom Matmat. Ils ajoutent que toutes les branches de cette tribu sont issues de Loua, fils de Matmat et frère d’Ourenchît. Ils ne nous apprennent pas si celui-ci laissa de la postérité. « Loua, disent-ils, eut quatre fils ; Ourmakcen, Belaghef[2], Ourigoul et Ilisen. Les trois premiers eurent de la postérité, et c’est d’eux que toutes les branches de la tribu de Matmata tirent leur origine. D’Our-

  1. Variantes : Sedoutkės, Sedounkės.
  2. Variantes : Telaghef, Ilaghef.