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Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/498

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APPENDICE.

leurs compatriotes à passer du côté d’Acem. Aussitôt, la majeure partie des troupes d’Abou-Koreib l’abandonna, et le mit ainsi dans la nécessité de rentrer dans la ville. Il y fit une vigoureuse résistance à l’aide d’environ mille combattants qui lui étaient restés fidèles, tous gens d’un rang élevé et qui se distinguaient par leur prudence et leur piété. Les Ourfeddjouma les attaquèrent avec vigueur ; Abou-Koreib fut tué dans un assaut, et ses compagnons succombèrent tous, les armes à la main. Les Berbères pénétrèrent alors dans la ville où ils violèrent la sainteté des harems et se portèrent aux excès les plus horribles. Après cette victoire, Acem s’établit dans l’endroit qu’on appelle le Mosalla de Rouh[1], et ayant confié le gouvernement de Cairouan à Abd-el-Mélek-Ibn-Abi-Djâda de la tribu de Nefzaoua, il alla à Cabes pour combattre Habîb. Celui-ci essuya une nouvelle défaite et fut contraint de se réfugier dans le Mont-Auras, où demeuraient les parents de sa grand’mère. Acem le poursuivit jusqu’à la montagne où il l’attaqua encore une fois ; mais son armée fut mise en déroute et il perdit lui-même la vie ainsi que la plupart de ses compagnons. Habîb marcha aussitôt sur Cairouan, et il trouva la mort en combattant Ibn-Abi-Djâda qui était sorti pour le repousser. Cet événement arriva dans le mois de Moharrem de l’an 140 (mai-juin 757). Ainsi s’éteignit la branche de la famille de Fihr[2] établie dans le Maghreb.

Abd-er-Rahman-Ibn-Habîb gouverna dix ans et quelques mois ; son frère El-Yas exerça l’autorité dix mois. Quant à Habîb, son règne ne fut que d’un an et six mois. Ce fut ainsi que Dieu accomplit la prière de son pieux serviteur, Handala-el-Kelbi.

  1. Le Mosalla (oratoire) est une grande place en plein air et située en dehors de la ville, où le peuple se réunit, en temps de sécheresse, pour demander à Dieu de lui envoyer de la pluie. On y célèbre aussi la prière des deux fêtes consacrées par la religion musulmane.
  2. Fihr était l’ancêtre de la tribu de Coreich. A l’époque dont il s’agit ici, la haute noblesse de l’Afrique, c’est-à-dire, les chefs arabes, se composait de Coreichides et d’autres descendants de Moder.