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Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/518

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APPENDICE.

les autres chefs ; mais, pendant qu’il marcha sur cette ville, il rencontra Ibn-el-Djaroud, qui en était sorti pour aller au-devant de Yahya-Ibn-Mouça, lieutenant de Herthema-Ibn-Aïen.

Voici ce qui motiva l’arrivée de ce dernier en Ifrîkïa : le khalife Er-Rechîd, ayant appris la révolte d’Ibn-el-Djaroud et le bouleversement que cet événement avait produit dans la province, y envoya Yactîn-Ibn-Mouça pour rétablir l’ordre. Il avait choisi ce général d’abord à cause des éminents services qu’il avait rendus à la cause des Abbacides, et du haut rang qu’il occupait sous cette dynastie ; ensuite en raison de son grand âge et de la haute estime dont il était l’objet parmi les troupes de Khoraçan[1]. Après lui avoir recommandé d’user d’adresse pour déterminer Ibn-el-Djaroud à quitter le pays, il le congédia en le faisant accompagner par El-Mohelleb-Ibn-Rafê, et ensuite il envoya après lui Mansour-Ibn-Zîad et Herthema-Ibn-Aïen. Ce dernier devait même prendre le gouvernement du Maghreb, mais il s’arrêta à Barca. Quant à Yactîn, il se rendit à Cairouan, où il eut une longue entrevue avec Ibn-el-Djaroud, auquel il communiqua les lettres du khalife. Après en avoir pris connaissance, Ibn-el-Djaroud parla ainsi : « Je suis entièrement soumis à la volonté du Commandant des croyants ; ce papier m’informe qu’il a nommé Herthema-Ibn-Aïen gouverneur de la province ; il est maintenant à Barca, et il va bientôt arriver. [Je dois cependant vous faire observer] qu’El-Alâ est à la tête des Berbères et que, si je quitte la forteresse [de Cairouan], ils en prendront possession et finiront par ôter la vie à celui qui les commande aujourd’hui. Alors jamais aucun officier du khalife n’y mettra le pied ; de sorte que je me trouverai, moi, avoir frappé la ville de la plus grande calamité qui puisse l’atteindre. Je vous offre donc d’aller à la rencontre d’El-Alâ, et si je succombe, la forteresse vous restera ; si, au contraire, je gagne la bataille, j’attendrai l’arrivée de Herthema, et je me rendrai ensuite auprès du Commandant des croyants. » Alors Yactîn [désespérant de l’amener à un arrangement] eut

  1. On a déjà vu que les khalifes abbacides avaient fait passer en Afrique une grande quantité de troupes arabes, tirées de la province de Khoraçan.