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XLIV
INTRODUCTION.

effet, je devais lui offrir un présent composé de belles étoffes de soie et de plusieurs chevaux de race portant des selles d’or. Arrivé à Séville où je remarquai plusieurs monuments de la puissance de mes ancêtres, je fus présenté au roi chrétien. Il me reçut avec de grandes marques d’honneur, et m’assura qu’il éprouvait une vive satisfaction à me voir. Son médecin juif, Ibrahîm-Ibn-Zerzer, lui avait déjà fait mon éloge et l’avait instruit de la haute illustration de mes aïeux. » — « Il voulut alors me retenir auprès de lui, en promettant de me faire rendre les biens que mes ancêtres avaient possédés à Séville et qui se trouvaient alors entre les mains d’un des grands de son empire. Tout en lui faisant les remercîments que méritait une pareille offre, je le priai de m’excuser si je ne l’acceptais pas, et je continuai à conserver ses bonnes grâces. Lors de mon départ, il me fournit des bêtes de somme et des provisions de voyage, ainsi qu’une très-belle mule, équipée d’une selle et d’une bride garnies d’or, que je devais présenter au sultan de Grenade. »

Établi tranquillement en Andalousie, Ibn-Khaldoun se décida à y faire venir sa famille, et pendant quelques mois il demeura avec elle dans sa belle campagne d’El-Bîra. Cette terre, située dans la plaine de Grenade, lui avait été donnée par Ibn-el-Ahmer.

Il commença enfin à remarquer que la faveur dont il jouissait auprès du sultan excitait la jalousie du vizir Ibn-el-Khatîb. Cette découverte le décida à quitter l’Espagne et à rentrer en Afrique. Un autre motif contribua à hâter son départ : l’émir Abou-Allah-Mohammed, son ami et son compagnon de prison, venait de remonter sur le trône de Bougie et l’avait invité à venir remplir auprès de lui les fonctions de chambellan, charge que Yahya, frère d’Ibn-Khaldoun, remplissait déjà par interim. « Dans nos royaumes du Maghreb, dit notre historien, l’office de chambellan (hadjeb) consiste à diriger l’administration de l’état et à servir d’intermédiaire entre le souverain et ses grands officiers. »

Bien que le sultan de Grenade désapprouvât le projet d’Ibn-