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Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/571

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EN-NOWEIRI.

pagnons de Zîadet-Allah apprirent avec dépit que leur maître avait bien accueilli le vizir, et, étant allé le trouver, ils lui déclarèrent qu’Ibn-es-Saïgh l’avait trompé et qu’il était parti avec l’intention de se rendre en Sicile : « Voici, dirent-ils, l’homme qui vous a fait perdre votre royaume et qui a travaillé à renverser votre autorité ; voici l’homme qui a écrit au Chîite de vous attaquer. » Ces paroles réveillèrent la colère de Zîadet-Allah et il livra le vizir à Rechîd, un de ceux qui s’étaient ligués contre lui. Rechîd le décapita de sa propre main, et la tête de sa victime fut précipitée dans un égoût, après avoir servi de jouet aux jeunes gens de la ville. On rapporte que le Chîi déclara positivement qu’Ibn-es-Saïgh ne lui avait jamais écrit.

L’historien dit : Après avoir passé dix-sept jours à Tripoli, Zîadet-Allah prit la route de l’Égypte. La tentative faite à Cairouan par Ibn-Abi-’l-Aghleb pour se faire déclarer souverain l’avait irrité au point qu’il refusa de le voir, ainsi qu’un autre chef, El-Mosab-Ibn-Zerara, qui avait aussi encouru son déplaisir. Les ennemis de ces officiers profitèrent du moment favorable afin de les perdre tout-à-fait : ils représentèrent à Zîadet-Allah qu’Ibrahîm et El-Mosab attaquaient sa conduite et parlaient de lui avec un profond mépris ; qu’il les tenait maintenant en son pouvoir et qu’il devait bien s’imaginer les extrémités auxquelles ils seraient capables de se porter, si jamais ils entraient en Égypte. Il se décida alors à les tuer, mais ils échappèrent au danger et arrivèrent à Alexandrie. Le gouverneur de cette ville les prit sous sa protection et les envoya au Caire où ils arrivèrent avant Zîadet-Allah. Ils eurent ensuite une entrevue avec Eïça-en-Noucheri, qui commandait au Caire, et lui racontèrent les méfaits de Zîadet-Allah, auquel ils attribuèrent même l’intention de se rendre maître de l’Égypte. À la suite de cet entretien, En-Noucheri prit la résolution d’empêcher Zîadet-Allah d’entrer dans la ville jusqu’à ce que la cour [de Baghdad] lui eût fait connaître ses intentions. Des espions que Zîadet-Allah entretenait au Caire l’ayant instruit de ce qui venait de se passer, il fit partir Ibn-el-Cadim avec une lettre pour En-Noucheri dans laquelle, après beaucoup de compliments flatteurs, il le pria