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128 PROLÉGOMÈNES

la ligne jusqu'où il a porté ses garnisons forme la frontière; elle en- toure l'empire de tous les côtés, comme une ceinture. Dans quelques cas, l'empire porte ses frontières aussi loin que celui qu'il a remplacé; d'autres fois il les pousse plus loin et prend ainsi plus d'étendue. Cela arrive quand il possède plus de troupes que le premier empire n'en avait eu à sa disposition.

Tout ce que nous venons de dire a lieu pendant que le nouvel empire conserve encore l'empreinte de la civilisation nomade, et l'énergie austère qui se contracte dans le désert. L'empire arrive en- suite au faîte de la gloire et de la domination; les sources du revenu, coulant avec abondance, y font affluer les biens et les richesses; l'océan du luxe est prêt à déborder; la civilisation de la vie sédentaire y a fait un grand progrès; les nouvelles générations s'habituent au Men-ètre dans lequel elles ont été élevées. Les mœurs des soldats • s'adoucissent; ils jouissent des agréments de la vie, et cela commu- nique à leurs âmes un certain degré de mollesse et d'indolence; la vie sédentaire les énerve en les pliant' à ses usages. Cette manière de vivre porte ceux qui l'adoptent à se dépouiller de leur caractère mâle et austère, les fait renoncer à la rudesse de la vie nomade et les livre à l'ambition, passion qui les entraîne à rechercher le com- mandement et à se battre pour l'obtenir. Le sultan met un terme aux conflits par l'emploi de mesures qui ont pour résultat la mort des grands et la destruction des chefs. Les émirs et les grands disparaissent du monde, laissant après eux une foule de dépen- dants et de subordonnés. Ces changements nuisent à la puissance de P. 11 5. l'empire, dont ils ébrèchent^ le glaive. Voilà la première atteinte portée à l'intégrité de l'Etat; il la reçoit dans sa force armée, ainsi que nous l'avons dit. A cela viennent se joindre les dépenses exces- sives faites (par le souverain) pour satisfaire à l'amour de l'ostentation qui s'est emparé de lui, et à la prodigalité sans bornes à laquelle il se livre afin de rivaliser (avec les autres rois) ^. Il veut avoir une

' Lisez CA^ avec le manuscrit A. ' Pour cjU.ulL), lisez isLiulU, avec

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' Pour JjLJ, lisez Ji-j. le manuscrit A.

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