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D'IBN KHALDOUN. 235

le nom du vizir se trouvait indiqué par des lettres et d'autres signes. On y lisait qu'il remplirait les fonctions de vizir auprès du dix-hui- tième khalife (abhacide), que sous son administration tout marche- rait bien, qu'il dompterait les ennemis (de l'Etat) et ferait jouir l'empire d'une haute prospérité. Il y avait aussi des allusions à di- vers événements qui devaient avoir lieu, et encore d'autres prédic- tions semblables, le tout très-hasardé '. Cette production était mise sous le nom de Daniel (le prophète). Mofleh en fut émerveillé et .s'empressa de la commimiquer au khalife. Celui-ci ayant examiné les énigmes et les autres indices, dont la signification était assez trans- parente, devina qu'il s'agissait d'Ibn Ouehb et le choisit pour vizir. Voilà le résultat d'une trame ourdie avec une fausseté insigne et de l'ignorance du khalife à l'égard du vrai caractère de ces énigmes. Il me paraît évident que la prédiction attribuée à El-Badjerîki est un faux du même genre que celle-ci.

Je me suis adressé au cheikh Kemal ed-dîn, principal docteur du peuple étranger (les Mamlouks turcs) qui forme la communauté hané- fite en Egypte, pour savoir ce qu'il pensait de cette prédiction, et, comme il connaissait très-bien les divers systèmes du soufisme, je lui demandai quel était le soufi El-Badjerîki à qui on attribuait ce poëme. Il me répondit : « Cet homme fut un de ces gens que l'on désigne par le nom de calenders [carendetiya) , novateurs qui ont introduit la pratique de se raser la barbe. Il avait l'habitude de parler de ce qui* devait arriver aux rois de son temps, en déclarant que ces renseigne- ments lui étaient venus par la voie de la révélation extatique. Il faisait aussi des allusions à certains personnages qui avaient attiré particu- lièrement son attention, et désignait, dans sa pensée, par certaines lettres de l'alphabet, ceux d'entre eux qu'il jugeait en valoir la peine. . Il énonçait en un petit nombre de vers, qu'il retouchait à plusieurs reprises, les indications qui concernaient l'un ou l'autre de ces per- sonnages, et permettait à ses auditeurs de les répandre partout en

Littéral, «qui s'accomplirent ou qui * Pour ,j.f , jeiis Lf , avec l'édition de

ne s'accomplirent pas. • Boulac.

3o.

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