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D'IBN KHALDOUN. 395

savez, deux compagnons étroitement attachés. La science des pensées et celle de Y exposition forment ainsi une partie de la réalisation, et c'est avec leur aide qu'on parvient à faire comprendre ses pensées d'une manière complète, et à énoncer les exigences de chaque cas dans des termes qui leur correspondent exactement. Toute combinaison de mots qui ne répond pas suffisamment à la pensée et qui ne la fait pas bien entendre est loin d'atteindre au degré de la réalisation; aussi les rhétoriciens mettent-ils ces combinaisons au niveau des cris d'animaux. A vrai dire, on doit les regarder comme n'appar- tenant pas à la langue arabe ; car celle-ci fait parfaitement concorder la phrase avec les exigences du cas qu'elle représente. On voit, d'à- P. 353. près ces observations, que la réalisation est le fond, le caractère spé- cial, l'âme et la nature même de la langue arabe.

Il faut maintenant savoir que les rhétoriciens entendent par le terme discours naturel un discours qui montre la perfection de sa nature et de son caractère par la bonne manière dont il fait comprendre l'idée à l'expression de laquelle on l'avait employé. En effet, le discours est l'expression d'idées et leur énonciation au moyen de la parole. Il n'est pas une simple émission de sons, mais un (artifice) au moyen duquel celui qui parle entreprend de communiquer à la personne qui l'écoute les idées qu'il a dans son propre esprit, et cela d'une manière parfaite, en désignant ces idées par des indices (certains).

Quand les phrases se trouvent revêtues du caractère particulier (la clarté) qui est le fondement même du discours, on peut y ajou- ter divers genres de parure afin de leur donner, pour ainsi dire, l'é- clat de l'élégance : on les orne de rimes; on établit un parallélisme entre les propositions ^ ;■ on coupe le discours de diverses manières et d'après certains principes; on y emploie des mots à double entente afin de dissimuler fidée qu'il s'agit d'exprimer; on y met en rapport des termes dont les significations sont opposées, et tout cela afin d'amener des jeux de mots et des jetix d'esprit. De cette façon on

' Je lis J^ à la place de J**-.

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