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46 PROLÉGOMÈNES

Dans le dogme de l'unité de Dieu, ce n'est pas la foi, envisagée seulement comme ime simple déclaration affirmative, qu'il faut con- sidérer, car elle n'est alors qu'un accident de l'âme : ce dogme n'y est pas parfaitement établi tant qu'il ne lui a pas communiqué une qualité, celle de la foi, et que l'âme ne se l'est pas assimilée ^ C'est • ainsi que les bonnes œuvres et les pratiques de religion nous ont été prescrites dans le but de nous former à l'obéissance et à la soumission , et d'éloigner de nos cœurs toute préoccupation, excepté (le service de) l'Etre adorable; de sorte que nous, simples aspirants qui essayons de marcher (dans le sentier de la vérité), nous puissions devenir parfaits en science et en religion ^.

Il y a autant de différence entre la connaissance des dogmes de la foi et la réalité (c'est-à-dire la croyance intime à ces doctrines) qu'entre la profession et V appropriation^. Expliquons-nous : beaucoup de per- sonnes savent que montrer de la compassion envers les orphelins et P. 3a. les malheureux rapproche l'homme de Dieu. Comme la compassion est une vertu fortement recommandée, on prétend la pratiquer; on en reconnaît l'importance et l'on se rappelle les passages de la loi qui l'ordonnent; et cependant*, si l'on voyait un orphelin ou un pauvre malheureux, on serait plus porté à le fuir et à éviter sa rencontre qu'à essuyer ses larmes. (On ne ressent alors ni) la compassion, ni les sentiments, encore plus élevés, de la miséricorde, de la pilié et de ia charité. Un tel homme, avec une telle manière d'entendre la compassion envers les orphelins, ne parvient qu'à la station de la con- naissance seulement; il n'a pas atteint la station de la réalité'-' ni celle

' Voulant éviler les périphrases, j'em- regarde ia religion. » — Litléial. « la dif-

ploierai dorénavant le terme appropriation. férence entre la réalité et la connaissance,

pour désigner le résultat de celle opéra- pour ce qui regnrdcles dogmes, est comme

lion par laquelle l'àme ^'assimile ((_>LaJi la différence enlre le dire et l'appropria-

ou «_»^oo'j la foi, de manière à s'en faire tion. »

une fun/i/c' acquise et réelle. * Pour y* lisez jft..

  • Le terme 3Ç. signifie j ^tyJt tL»J( ' C'est-à-dire, arrivé à la station de la

^jJlj JaJI • profondément versé dans la connaissance, l'homme connaît le précepte,

science (de la vérité) et dans tout ce qui mais ne l'observe pas.

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