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Page:Ibsen - Les Revenants, La Maison de poupée, trad. Prozor, 1892.djvu/151

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LES REVENANTS

régine. Elle prend place sur une chaise, près de la porte de la salle à manger, et continue à tenir le verre vide.

madame alving. — Oswald… que me disais-tu de la joie de vivre ?

oswald. — Oh, mère, la joie de vivre… ! Vous ne la connaissez guère dans le pays. Je ne la sens jamais ici.

madame alving. — Pas même quand tu es chez moi ?

oswald. — Pas quand je suis à la maison. Mais tu ne me comprends pas.

madame alving. — Mais si, je crois presque saisir ton idée… maintenant.

oswald. — La joie de vivre… et puis la joie de travailler. Hé ! c’est au fond la même chose. Mais cette joie vous est également inconnue.

madame alving. — Tu as peut-être raison. Parle-moi encore de cela, Oswald.

oswald. — Tiens, je pense tout simplement qu’on apprend ici à regarder le travail comme un fléau de Dieu, une punition de nos péchés, et la vie comme une chose misérable, dont nous ne pouvons jamais être délivrés assez tôt.

madame alving. — Une vallée de larmes, oui. Et vraiment nous nous appliquons consciencieusement à la rendre telle.

oswald. — Mais, là-bas, on ne veut rien savoir