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Page:Ibsen - Peer Gynt, trad. Prozor, 1899.djvu/26

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XIX
PRÉFACE

musical, léger et fugitif ; ces souffles sont des reproches faits à Peer, sur le déclin de ses jours, par sa conscience inquiète. Le malin compère trouve réponse à tout, équivoquant, persiflant, invectivant même, résolu à se défendre contre ces voix importunes avec l’entregent qui l’a tant de fois sauvé dans les plus mauvaises passes.

Les idées, dans tout ce passage, sont exprimées avec une subtilité harmonieuse par des mots dont chacun porte, dont chacun est irremplaçable et comme sens et comme valeur prosodique. Cette subtilité, cependant, ne devient nulle part prétention ou recherche. Il s’agissait d’exprimer ce qui se passe au fond de la nature de Peer, et il n’y a rien dans ces vers, si délicats pourtant de facture, qui ne soit conforme à cette nature, qui n’en reproduise tous les éléments, depuis les intuitions obscures qui lui viennent du fond de son âme jusqu’aux instincts grossiers, jusqu’à la brutalité du langage et même jusqu’au penchant pour les calembredaines.

Dans la scène dont je parle, Ibsen a, sans contredit, concentré toutes ses ressources, et cela suffirait déjà à créer de grandes difficultés à ses traducteurs.