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Page:Icy - Brassée de faits, 1926.djvu/231

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MÉLIE

ciens en matière de couleurs. Vous comprenez à merveille ce que je veux dire ainsi.

Mais, avant ce jour-là, je tiens à le dire, je n’avais jamais songé à tout cela, car, à treize ans, je ne discernais aucunement de différence entre les deux sexes, innocent comme au jour de ma naissance. Ma chasteté était absolue et, si je subissais déjà l’attirance du sexe que mon destin me ferait tant aimer, c’était sans le connaître encore. C’était littéralement sans savoir encore en quoi les femmes différaient des hommes.

Mélie me menait dans la salle à manger donnant sur la cour. Les fenêtres en étaient fermées, quoiqu’on fût en juin, mais il y faisait bon. Après le déjeuner, son gros ouvrage terminé, elle avait dû prendre quelques soins de coquetterie, elle venait de se savonner la figure sans doute, et rudement, car la peau de ses joues charnues luisait, à l’égal des cuivres de sa cuisine.

Elle allait, je pense, se remettre à quelque tâche interrompue par mon coup de sonnette : je voyais ses ciseaux, son dé, sur la table, près d’une bobine de coton rouge, tandis que des torchons neufs à marquer s’empilaient à côté.

Je marchais devant elle qui me tenait d’une main posée à la hauteur de ma taille. Je ne sentais pas pour la première fois le contact de cette main, car toujours me tenant de la sorte, elle me guidait en m’introduisant, dans la maison pour rejoindre Paul, occupé à ses devoirs, ou jouant avec son meccano.

Mais, parvenu à la salle à manger, au lieu de libérer