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Page:Idylles de Théocrite et Odes anacréontiques.djvu/83

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excellent, que je trais moi-même ; et jamais, ni en été, ni en automne, ni par le plus rude hiver, le fromage ne me manque, et les claies en sont toujours pleines. Et puis je sais jouer de la syrinx mieux qu’aucun autre cyclope, et je chante, ô chère pomme douce, et je chante mon amour jusqu’aux dernières heures de la nuit. Je nourris pour toi onze petites biches ornées de colliers, et quatre petits ours. Viens à moi, et tu ne perdras rien. Laisse la glauque mer s’élancer vers la terre ferme. Tu passeras plus heureuseusement la nuit à mon côté, au fond de l’antre. Là sont des lauriers, de grêles cyprès, un lierre noir, une vigne aux doux fruits et une eau fraîche, liqueur ambroisienne que l’Etna m’envoie de ses blanches neiges. Peut-on préférer à tout cela la mer et ses flots ? Si je te semble trop velu, j’ai du bois de chêne, et je garde sous la cendre un feu qui ne meurt jamais, et je souffrirai que tu brûles mon âme et mon œil unique, bien qu’il soit ce que j’ai de plus cher. Je suis malheureux parce que ma mère ne m’a pas enfanté avec des branchies, et que je ne puis plonger vers toi et te baiser la main, si tu me refusais les