Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/203

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— « Et cependant il a beaucoup de considération pour vous. »

— « Mais l’amour que j’ai senti et que je sens encore pour milord Elmwood méritait, ce me semble, quelque chose de plus en retour, que beaucoup de considération. »

— « Aussi milord vous aime-t-il, j’en suis sûre. »

— « Mais son amour est-il égal au mien ? Je pourrais l’aimer, lui, quand même j’aurais bien des torts à lui reprocher ; — et pourtant, ajouta-t-elle après un moment de réflexion, c’est, je crois, parce qu’il me paraissait irréprochable, que d’abord je n’ai pu me défendre de l’aimer. »

Ainsi parla encore quelque temps miss Milner ; tantôt avec dépit, tantôt en feignant de plaisanter, jusqu’à ce qu’un domestique vint les avertir qu’on avait servi. En entrant dans la salle à manger, miss Milner s’aperçut que la place de milord Elmwood n’était pas occupée ; elle recula de surprise. Ne point dîner avec lui était un chagrin auquel elle ne s’était pas attendue, et cette absence de milord, immédiatement après ce qu’elle venait d’apprendre de miss Woodley, ne pouvait qu’augmenter la mauvaise humeur où elle était déjà. — Elle avance sa chaise, s’assied avec une indifférence qui disait clairement qu’elle n’avait aucune envie de manger, et, sans déployer sa serviette, sans toucher à son couvert, elle met, en boudant, ses doigts sur ses lèvres, et ne répond pas un seul mot à tout ce qui se dit pendant le dîner. Miss Woodley et madame Horton connaissaient trop bien l’état de son cœur pour s’offenser de sa conduite, ou même pour paraître la remarquer ; elles dînèrent et ne proférèrent pas une seule parole qui pût l’aigrir davantage ou dissiper son humeur. Comme on allait sortir de table, on frappa rudement à la porte. « Qui est-ce qui nous arrive ? dit madame Horton. » Un des do-