Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/81

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quelle était bien à plaindre, qu’il y avait de l’injustice et de la barbarie à forcer tant de charmes à s’ensevelir à la campagne, tandis que la ville était remplie de ses admirateurs, qui languiraient dans son absence autant qu’elle-même dans sa solitude. Toutes ces preuves d’un intérêt général, répétées cent fois et de cent manières, flattèrent sa vanité, mais ne la firent point changer de résolution.

Cependant il lui échappait plus souvent de ces soupirs involontaires que miss Woodley avait déjà remarqués. Quelquefois même ses yeux se remplissaient de larmes, et miss Woodley s’en était encore aperçue, Étaient-ce des symptômes d’ennui ou de chagrin ? miss Woodley ne pouvait le croire ; car son amie, tout en se livrant à sa mélancolie, ne paraissait ni ennuyée, ni affligée. Elle en conclut donc que ses premiers soupçons étaient fondés, et que l’amour, quoiqu’elle ne connût l’amour que de nom, était maître du cœur de miss Milner. « Ses yeux auront été séduits par les grâces de Frédéric, et sa raison, qui n’a pu s’aveugler sur les défauts du jeune lord, lui reproche son amour pour lui. »

« Oh ! s’écriait-elle, oh ! pourquoi son tuteur et M. Sandford ne peuvent-ils connaître, comme moi, tous les combats qui se passent en elle ! combien leur paraîtrait digne d’admiration cette miss Milner qu’ils condamnent si souvent ! »

Persuadée qu’elle avait deviné juste, et sûre que ses intentions étaient bonnes, miss Woodley ne manqua pas de faire part à l’un et à l’autre de l’état où elle ne doutait pas que ne fût le cœur de sa jeune amie, et des motifs qu’elle avait pour croire que l’amour seul causait ses peines. Dorriforth, à ce récit, fut vivement affecté. Sandford y vit une raison de plus pour presser le départ. En effet, quelques, jours après, miss Milner quitta Londres avec madame