Page:Inscriptions de l'Orkhon déchiffrées.djvu/65

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— 63 —

thou. Les grands du royaume délibérèrent ensemble, et dirent: ‘Des fils des quatre khans, Che-thou est le plus sage.' En conséquence, ils allèrent au-devant de lui, et le nommèrent roi sous le nom de Mi-kiu-liu-che-mo-hochi-po-lokhan; on l'appelait aussi Cha-po-lio; il fixa sa résidence sur le mont Tou-kin (voir p. 60, note 2). 'An-lo, s'étant soumis à lui, alla demeurer sur les bords de la rivière To-lo[1]), et reçut le titre de second khan. Ta-lo-pien adressa alors une demande à Cha-po-lio: 'Moi et vous, dit-il, nous sommes tous deux fils do khans, et chacun de nous a le droit de succéder à son père; mais, aiyourd'hui, vous êtes au sommet des honneurs, et moi seul je ne suis revêtu d'aucune dignité. Pourquoi cela?' Cha-po-lio[2]) en fut affligé et lui donna le titre d'A-po-khan. Il s'en retourna et se mit à la tête de ses sujets[3]).»

Il y eut encore d'autres membres de la dynastie qui reçurent le titre de khan, sous la suzeraineté de Cha-po-lio. Tel fut en particulier Tien-kioue, frère (ou oncle?) de Cha-po-lio, et qui fut mis à la tête des Turcs occidentaux avec le titre de Ta-teou-khan (= Tardou, TàQÔ(yv des écrivains byzantins[4])). De cette époque — vers l'an 600 — date la séparation des Turcs en deux empires, les Turcs orientaux et les Turcs occidentaux, ayant chacun leur khan, et ces derniers ne nous regardant pas (comp. p. 70, note 3).

Les Tou-kioue furent toujours des voisins très gênants pour les Chinois: ils faisaient constamment des irruptions sur les fron- tières de la Chine et ravageaient le pays, ou bien ils s'immisçaient dans les troubles des Chinois si bien qu'ils savaient toujours en tirer parti. Tout en désirant se tenir bien avec ces voisins guer-

  1. Tola, affluent de l'Orkhon, en turc, Toyia, voir II E 30.
  2. C'est par inadvertance que Stan. Julien écrit Ta-lo-pien.
  3. Journ. as. III, p. 354 — 356. J'ai cité in extenso ce passage et un autre plus bas, parce qu'ils mettent en bonne lumière ce que disent les inscriptions I E 4—5 = II E 5—6. Comp. aussi ce que dit plus tard un prince turc, fils de Che-thou khan: «Depuis Mo-kan khan, un grand nombre de nos princes des Tou-kioue ont remplacé leurs frères aînés par leurs frères cadets, leurs fils légitimes par des bâtards. Ils ont manqué de respect à nos ancêtres et ont violé leurs lois.» Ibid p. 504.
  4. Peut-être = turc Tarduëf Voir I E 13, note 21; I N 13.